Après le fameux “Big Quit”, avez-vous aussi entendu parler du “Quiet Quitting” ? Ce nouveau phénomène traduit un manque de motivation et d’engagement des équipes si profond qu’elles en viennent à démissionner en silence. C’est-à-dire : lever le pied au travail et se cantonner à sa fiche de poste.
Comment en est-on arrivé là ? Qui sont les “quiet quitters” ? Et comment, en tant que professionnel·les des Ressources Humaines et managers peut-on s’adapter et renouer le dialogue avec les salarié·es concerné·es ?
Nos explications dans cet article.
Quiet Quitting (Démission Silencieuse) : définition
💡 Le Quiet Quitting est un phénomène récent dans le monde du travail. Ce concept qualifie le comportement de salarié·es désengagé·es qui font leur travail mais cessent de "performer" en entreprise.
La fin de la quête de la performance ?
Si “Quiet Quitting” se traduit littéralement par “Démission Silencieuse”, il ne s’agit en fait pas du tout de démissionner mais plutôt de lever le pied. Les quiet quitters font leur travail, pour le même salaire, la même reconnaissance, mais moins de stress : ils et elles respectent scrupuleusement leurs horaires et se cantonnent à leur fiche de poste, pas plus, pas moins.
Certains diront que les quiet quitters ne sont que des “partisans du moindre effort”. Mais il s’agit davantage de salarié·es profondément désengagé·es qui ne souhaitent plus se définir par le travail et choisissent de respecter, à la lettre, le contrat qui les lie à l’entreprise, sans chercher à surperformer pour obtenir une promotion ou une augmentation.
Fini, donc, de répondre aux emails en dehors des heures de travail, d’aider des collègues sur d’autres projets, d’accepter de nouvelles responsabilités, d’endosser le travail de plusieurs personnes. Le travail n’est plus au centre des préoccupations de ces salarié·es “quiet quitters”.
Selon une étude Gallup : 25% des actifs et actives en France sont totalement désengagé·es et seulement 6% sont dévoué·es à leurs tâches au travail.
Un phénomène popularisé par TikTok
Sur le réseau social Tik Tok, utilisé en majorité par des jeunes (60% des utilisateur·rices ont entre 16 et 24 ans), de nombreuses vidéos questionnent le monde du travail depuis la pandémie Covid-19.
Été 2022, c’est sur cette plateforme que le phénomène de “Quiet Quitting” s’est popularisé Outre-Atlantique jusqu’à atteindre la France. À l’origine de ce phénomène, Zaid Khan, ingénieur New-Yorkais, explique le concept de “Quiet Quitting” dans une vidéo virale visionnée plus de 3 millions de fois. Depuis, les vidéos mettant en scène le Quiet Quitting se multiplient et cumulent plus de 125 millions de vues, diffusant largement le concept auprès des jeunes générations.
Qu’est-ce qui a causé le phénomène de Quiet Quitting ?
D’où vient ce désengagement des salariés ?
Le Quiet Quitting apparaît dans le sillage de la Grande Démission (Big Quit ou Great Resignation), un phénomène post-Covid. En France, le nombre de démissions a atteint un niveau historique : plus de 520 000 salarié·es ont quitté leur entreprise au premier semestre 2022. Aux États-Unis, en 2021, ils·elles étaient 41 millions à démissionner.
Le Quiet Quitting comme la Grande Démission ont pour cause deux facteurs principaux.
- Les nouvelles aspirations des salarié·es dans un monde post-Covid : les longs mois de confinement et de restrictions sanitaires, ainsi que les mutations (forcées) du monde du travail ont fait naître de nouvelles exigences chez les salarié·es. Ils et elles recherchent davantage de sens dans leur quotidien, demandent aux entreprises de s’engager en faveur de leur bien-être et de leur équilibre vie professionnelle / vie personnelle, et souhaitent protéger leur santé mentale (et éviter le burn-out qui touche aujourd’hui 2,5 millions de personnes en France).
- Un marché de l’emploi dynamique : les talents trouvent facilement du travail, ont le choix entre de nombreuses opportunités et ont donc moins peur d’abandonner leur CDI.
Un clivage générationnel
La philosophie de “Quiet Quitting” est avant tout portée par les jeunes générations, et plus particulièrement la Génération Z.
Il y a en effet un véritable désenchantement de la part de ces jeunes générations en quête de sens et conscientes des enjeux climatiques et sociétaux, vis-à-vis du monde de l’entreprise. Plus sensibilisées aux problématiques de santé mentale, elles accordent aussi énormément d’importance à l’équilibre vie professionnelle / vie personnelle et ne placent pas le travail au centre de leur vie.
70% des jeunes seraient prêts à quitter leur emploi si on leur demandait d’être à 100% en présentiel (ADP Research Institute).
Quiet Quitting : comment l’entreprise peut s’adapter et lutter contre le désengagement des salarié·es ?
Installer une nouvelle table de ping pong dans les bureaux ne suffira pas. L’entreprise doit renouer le dialogue avec les quiet quitters et agir sur les leviers d’engagement au travail.
Agir sur les vrais leviers de motivation
Les chèques cadeaux, c’est bien. Mais ça ne suffit pas ! Avant toute chose, l’employeur doit se concentrer sur les leviers de motivation les plus importants que sont la rémunération, le contenu du travail, l’équilibre vie pro / perso, le développement des compétences, et les relations entre collègues et entre managers et salarié·es. 93%* des employé·es estiment que bénéficier d’une formation impacte leur engagement au travail. La formation a un vrai rôle à jouer dans l'engagement des collaborateurs, aussi bien sur le développement professionnel que personnel (par les soft skills) grâce à des solutions e-learning comme Edflex. La direction doit adapter chacun de ces éléments pour remobiliser ses équipes.
*Selon une étude menée par Edflex sur 300 personnes suite au confinement 2020.
Créer un environnement de travail plus épanouissant
Les quiet quitters ont de nouveaux besoins de liberté auxquels l’entreprise peut répondre. En favorisant la pratique du télétravail, en passant à la semaine de 4 jours (c’est possible !) et en mettant en place de nouvelles solutions pour créer un environnement de travail épanouissant qui préserve la santé mentale.
Renouer le dialogue entre le management et les salarié·es
Les managers sont le point de contact direct avec les salarié·es. C’est pourquoi il est primordial de les former à détecter les signaux faibles de désengagement et à y répondre. Ce sont aussi eux·elles qui portent la vision, les valeurs et le projet de l’entreprise auprès des équipes. Ils et elles doivent incarner au mieux la mission de l’entreprise pour redonner le sens du collectif aux individus.
Cas extrêmes : quelles solutions ?
Dans certains cas de Quiet Quitting influençant négativement les performances de l’entreprise, les professionnel·les RH devront prendre des actions plus radicales. Une solution peut être de s’accorder avec le·la salarié·e concerné·e sur une rupture conventionnelle. Si cela ne fonctionne pas, l’entreprise peut aller jusqu’au licenciement, à condition de pouvoir justifier cette démarche :
- Le “Quiet Quitting” pourrait être qualifié d’insuffisance professionnelle, un motif non disciplinaire de licenciement. La personne salariée était dans de bonnes dispositions pour réussir son travail mais n’a pas atteint ses objectifs, causant un préjudice pour son entreprise;
- Dans le cas d’une négligence fautive, le motif disciplinaire peut être invoqué mais l’entreprise doit démontrer la faute intentionnelle, une démarche compliquée.
Qu’est-ce que le “Quiet Firing” ? Dérivé du “Quiet Quitting”, le “Quiet Firing” désigne la mise au placard d’un·e salarié·e par leur manager. Le manager l’empêche d’évoluer, de participer à de nouveaux projets, de poser des congés ou d’obtenir une augmentation.
Il n’y a pas de recette miracle pour ré-engager des salarié·es quiet quitters. Mais l’entreprise doit prendre au sérieux ce phénomène et s’ajuster à cette nouvelle vision du monde du travail : un monde dans lequel l’individu ne se définit plus par son travail et recherche, avant tout, un bon équilibre entre sa vie professionnelle et personnelle.
Rédactrice web, ex Content manager @ Sport Heroes